Hospitalité franco-turque dans un parc municipal
Il est 16h de l’après-midi. Nous sommes sur le point de quitter la ville de Derinkuyu, bien que nous venons d’y arriver, après 60 km de lutte contre un vent-en-pleine-forme. Aucune des deux options d’accommodation a passé le test rapport-gentillesse-toilettes-prix. De leur côté, les chambres de l’attraction principale de Derinkuyu, une ville sous terraine de sept étages, sont certes au prix d’une chambre d’hôtel mais la durée de l’occupation n’est que de 40 minutes et c’est fermé la nuit. Hygiène et instinct nous poussent donc à partir en quête d’un lit dans une autre ville.
A ce moment la rue devient un miroir: de l’autre côté de l’image on voit deux cyclistes, un couple. (Le miroir déforme un peu car il semble que nous avons chacun perdu une dizaine de kilos.) Jean-François et Isabelle viennent de Izmir en vélo. Ils sont français (des vrais! ils voyagent avec des verres (en verre !) dans leurs sacoches parce que les verres en plastique portent atteint au gout du vin, qui fait bien sûr également partie de leur équipement de voyage.) Ils ne sont jamais victimes d’ hôteliers capricieux, de prix exorbitants ou de puces car, en plus des verres, ils voyagent avec leur propre maison en voile : une tente qu’ils monteront ce soir dans le parc municipal, dans l’ombre d’une statue gigantesque d’Atatürk. On les regarde comme nos parents regardaient les Beatles: plein d’admiration parce que la promesse d’un autre monde s’ouvre. En effet, nous avons une tente aussi mais l’unique fois qu’elle a vu la lumière du jour était le jour de l’achat dans notre salon, au grand émerveillement de notre chat. Nous l’avouons : nous sommes des vierges de camping. Mais toujours prêts à tenter une expérience psychédélique.
Ce qui suit est une soirée animée par des turcs hyperkinétiques, de l’hospitalité turque mise en œuvre par des français, du yeni raki à côté d’une piscine vide sous une lune presque pleine et une nuit dans notre tente où je deviens un peu Jeanne d’Arc : j’entend des voies et des bruits inquiétants,… quelqu’un qui s’approche (le vent), un loup qui gronde (le photographe qui se retourne dans son sac de couchage), des chiens sauvages dans le loin (des chiens sauvages dans le loin),… Suivi par un petit déjeuner pain frais-chocolat offert par Isabelle, magicienne du camping et Jean-François qui se fait-des-amis-rien-qu’en-regardant-autour-de-lui.
N’oublions pas que nous sommes en Turquie : un passager admire les tentes sous l’arbre et nous apporte une petite table et quatre chaises. Quelqu’un d’autre y dépose un plateau avec du thé et quatre verres. Tout ceci dans le parc municipal, à côté du terrain de foot, dans l’ombre de la statue d’Atatürk, qui vit que c'était bon.
De gauche à droite: amis dans le parc - Rencontre de voyageurs en vélo: Olivier & Elsa et Jean-François & Isabelle et nous - Une première!
(Jean-François et Isa: pour vous en français - excusez-nous les fautes - notre cerveau marche en Turque en ce moment.)